T08 : Astérix chez les Bretons
Astérix chez les Bretons est le huitième album de la série de bande dessinée Astérix le Gaulois de René Goscinny (scénario) et Albert Uderzo (dessin), prépublié dans Pilote du N° 307 (9 septembre 1965) au N° 334 (17 mars 1966) et édité en album à 900 000 exemplaire en 1966. (Le premier tirage du précédent tome était de 600 000). Par la suite cet album fut adapté en dessin animé en 1986 (voir : Astérix chez les Bretons).
L’histoire commence en Bretagne, non, pas la Bretagne actuelle des irréductibles gaulois, mais la Bretagne insulaire, aussi appelée Grande Bretagne, ou encore Angleterre pour nos contemporains. Ce pays fut dirigé par Cassivellonaus qui a longtemps vaillamment résisté à l’envahisseur romain. Malheureusement les légionnaires romains manquent de savoir vivre, ils se battent même pendant la pause de 5 heures et le week-end. Profitant du fait que les courageux guerriers bretons sont indisponibles dans ces moments là, Jules César ne tarde guère à vaincre Cassivellonaus et a envahir toute la Bretagne.
Toute ? Non. Seul le village de Cantium, au bord de la manche, résiste encore et toujours sous la direction du chef Zebigbos. Mais le moral des troupes s’effrite, les romains sont nombreux et leur victoire n’est plus qu’une question de temps. Pour éviter cette issue fatale, Jolitorax décide d’aller au village des irréductibles gaulois pour demander à son cousin Astérix de l’aide.
Cette aventure, pleine de rebondissements, joue sur un nouveau registre de jeux de mots. Cette fois, l’auteur traduit mot à mot des expressions anglaises. Pour ceux qui ont quelques bases en anglais c’est un régal à lire. Mais il ne s’agit pas là des seules touches amusantes, le caractère simple, direct et franc d’Obélix fait de lui un élément perturbateur et divertissant de premier ordre. Son personnage s’étoffe d’avantage (au niveau de la personnalité) et le cela le rend de plus en plus attachant. Il n’est définitivement plus le faire valoir d’Astérix et devient son égal en terme d’importance et de charisme.
Comme d’habitude Goscinny aime jouer sur les anachronismes mais surtout sur les stéréotypes des autres populations. Notons que cette fois, l’humour est plus subtil, on est loin de la caricature sans finesse qu’on a pu avoir pour les germains. On peut voir là une meilleure connaissance de ces populations car l’auteur a eu l’occasion de séjourner en pays anglophone et de maîtriser cette langue.
Le résultat est très plaisant à lire, l’histoire est rythmée, riche en retournement de situations et avec un humour parfois très british, qui contraste avec les autres tomes. C’est justement ce dernier point qui rend cet album incontournable.
Fiche du film animé de 1986 : Astérix chez les Bretons
Histoire complète
L’histoire commence en Bretagne, non, pas la Bretagne actuelle des irréductibles gaulois, mais la Bretagne insulaire, aussi appelée Grande Bretagne, ou encore Angleterre pour nos contemporains. Ce pays fut dirigé par Cassivellonaus qui a longtemps vaillamment résisté à l’envahisseur romain. Malheureusement les légionnaires romains manquent de savoir vivre, ils se battent même pendant la pause de 5 heures et le week-end. Profitant du fait que les courageux guerriers bretons sont indisponibles dans ces moments là, Jules César ne tarde guère à vaincre Cassivellonaus et a envahir toute la Bretagne.
Toute ? Non. Seul le village de Cantium, au bord de la manche, résiste encore et toujours sous la direction du chef Zebigbos. Mais le moral des troupes s’effrite, les romains sont nombreux et leur victoire n’est plus qu’une question de temps. Pour éviter cette issue fatale, Jolitorax décide d’aller au village des irréductibles gaulois pour demander à son cousin Astérix de l’aide.
(Attention la suite révèle des moments clés de l’intrigue.)
Après avoir exposé son problème au chef du village Abraracourcix, celui-ci accepte de l’aider. Le druide Panoramix prépare donc un tonneau de potion magique pour les irréductibles Bretons. Comme le tonneau est un peu trop lourd à porter pour le pauvre Jolitorax, Astérix et Obélix décident de lui prêter main forte pour le voyage du retour.
Peu après avoir pris la mer, ils croisent un galère romaine. Obélix étant particulièrement en manque de romains (ils étaient tous partis en Bretagne) ne peut résister à l’envie de passer à l’abordage pour se dégourdir les poings. Ce court intermède aura comme fâcheuse conséquence de permettre aux romains de connaître les intensions des gaulois. La progression du voyage s’en trouvera ralentie.
Les trois compères s’arrêtent dans l’auberge du Rieur Sanglier où Obélix découvrira avec effroi qu’ici la viande de sanglier est servie bouillie avec de la sauce à la menthe (quel manque de respect pour la pauvre bête). Mais le dîner est vite interrompu par une patrouille romaine venue vérifier que les auberges ferment bien pour le couvre feux. Astérix, Jolitorax et Obélix doivent donc partir, mais attirent l’attention du centurion avec leur le tonneau de potion. Lorsque celui-ci demande ce qu’il contient, Astérix, pour le dégoûter, prétend qu’il est rempli de cervoise tiède. Pensant trouver du vin gaulois, le centurion, déçu, les laisse partir.
Quelques instants plus tard un messager romain vient informer la patrouille, que des dissidents gaulois circulent avec un tonneau de potion magique.
Des patrouilles finissent par retrouver et encercler les trois compères qui se voient obligés de fuire pour protéger le tonneau, au grand désespoir d’Obélix qui souhaitait s’amuser un peu.
Arrivé à Londinium (Londre), ils font escale à l’auberge de Relax, qui les accueille de bon cœur. Le tonneau est caché à la cave parmi les autres tonneaux de la réserve pour passer inaperçu. Mais leur repas est rapidement troublé par l’arrivée d’une patrouille romaine. Astérix, Obélix et Jolitorax sont cachés sous une trappe secrète. Les romains ont pour mission de récupérer tous les tonneaux de la ville pour trouver celui qui contient la potion magique. L’aubergiste impuissant ne peut que les regarder emporter son stock et le tonneau de potion magique qu’il cachait.
Dans les caves de la caserne romaine, les soldats sont obligés de passer la nuit à goûter les tonneaux un par un pour trouver celui qui contient la potion magique. Au petit matin, lorsque Astérix et Obélix viennent pour récupérer leur tonneau, ils ne rencontrent aucune résistance, la plupart des soldats étant ivres morts.
Les tonneaux de Relax sont tous ouverts. Obélix entreprend de goûter les tonneaux de vin pour trouver le bon. Mais comme il n’est pas habitué à l’alcool il devient saoul avant d’avoir trouvé le bon. Astérix pour éviter de finir comme la garnison romaine, juge préférable d’emporter tous les tonneaux de Relax afin de faire le tri plus tard.
Sur le trajet du retour, Obélix qui n’est plus tout à fait lui-même à cause de l’alcool agresse une patrouille, obligeant Astérix et Jolitorax à abandonner le chariot de tonneaux pour aller le chercher. Un voleur en profite pour subtiliser leur véhicule et son chargement.
Obélix s’étant endormi à cause de l’alcool, Astérix et Jolitorax décident de le ramener chez Relax avant de commencer à chercher le chariot et son voleur.
Après quelques heures de recherches infructueuses, ils reviennent chez Relax et constatent alors que le romains ont brûlé l’auberge et font prisonniers Relax et Obélix. En effet, les romains se sont rendu compte que les seuls tonneaux manquants à la garnison venaient de cette auberge.
Les deux prisonniers ont été enfermés à la Tour de Londinium où Obélix se réveille avec une gueule de bois très désagréable. Dès qu’il a un peu repris ses esprits, il prend sous le bras Relax (au sens propre) et s’évade avec lui. Il retrouvera rapidement Astérix qui était venu à son secours.
Relax conduit ses amis chez Surtax son cousin aubergiste. Ce dernier à de bonnes nouvelles pour eux, un individu est venu lui vendre un tonneau de vin et comme le tonneau était marqué du nom de Relax, il a compris qu’il s’agissait d’un voleur et l’a fait suivre. Astérix et ses amis se rendent donc chez le voleur et y récupèrent la liste des personnes qui ont acheté la cargaison volée.
Après avoir fait le tour des clients en sniffant le contenu au lieu de le boire (on se demande pourquoi ils n’ont pas fait ça dans la cave de la garnison romaine), il ne reste plus finalement qu’une personne sur la liste. Malheureusement, lorsqu’ils arrivent, cette personne à déjà revendu le tonneau à l’équipe de rugby de Camulodunum. Astérix et Obélix récupèrent le tonneau en plein mach mettant une sacrée pagaille dans la partie. Ils s’enfuient dans une barque par le fleuve, mais sont attaqués par une galère romaine qui leur envoie une pierre grâce à une catapulte. Le projectile anéanti la barque, le tonneau et les espoirs de Jolitorax.
Lorsqu’ils arrivent enfin au village de Jolitorax sans le tonneau de potion magique, le moral des troupes est plombé par cette nouvelle. Pour éviter de les décourager, Astérix prétend qu’il est capable de faire de la potion magique. Il fait chauffer de l’eau et y jette quelques feuilles d’une plante inconnue qu’il avait pris chez Panoramix. Il n’a aucune idée de ses effets, mais le but recherché est juste un effet placebo pour qu’ils reprennent confiance en eux.
Persuadé d’avoir bu de la potion magique, ils sont déchaînés, les romains pour leur part perdent leur envie de combattre en voyant Astérix et Obélix parmi eux. On leur avait dit qu’ils s’étaient noyés, mais leur présence prouve le contraire. De plus, en voyant l’énergie combative qui anime Zebigbos et ses guerriers, les romains redoutent que les deux gaulois aient finalement réussi à leur apporter de la potion magique.
L’affrontement est de courte durée, les romains battent rapidement en retraite. Astérix explique alors à Zebigbos que ce qu’ils ont bu n’était pas de la potion magique. Le chef Breton qui a repris confiance en lui décide que lorsqu’il aura fini de chasser les romains de son pays, il fera de cette boisson, la boisson nationale – dès qu’Astérix aura pu se renseigner sur le nom de la plante qu’il a utilisé pour la faire.
Une fois de retour en Gaule, Obélix peut enfin savourer un sanglier rôti (et non plus bouilli avec de la menthe) dans un grand banquet dressé en l’honneur des deux courageux gaulois. Pendant le repas Panoramix révèle que la plante qu’Astérix a utilisée pour faire la potion est du thé.
Humour décrypté
( N.B.: « p10-c5 » signifie « planche 10 case 5 »; les éléments sont classés selon leur apparition chronologique dans l’album. )
Outre le mode humoristique habituel de Goscinny et Uderzo dans leurs albums (souvent basé sur les anachronismes), Astérix chez les Bretons présente des éléments spécifiques liés à la culture britannique. Bien que Goscinny soit arrivé en 1945 aux États-Unis sans connaître un mot d’anglais, ses différents séjours les années suivantes lui ont permis de maîtriser cette langue. Dans cet album, il parodie systématiquement les tournures de phrase usitées en anglais, en les traduisant mot-à-mot en français.
Traduction mot-à-mot
- "S’il vous plaît" (p2-c6) = Please, pour "Je vous en prie".
- "Fin de semaine" (p2-c7), le célèbre week-end internationalisé.
- "Choquant!" (p2-c8) = Shocking!
- "Plutôt" (p3-c2) = Rather.
- "Et toute cette sorte de choses" (p3-c7) = And all that sort of things = et caetera.
- "Je dis" (p4-c4) = I say, que les Bretons de l’album placent à tout bout de champ dans leurs phrases. Typique d’un Anglais de la haute société du début du XXe siècle – était utilisé pour souligner quelque chose.
- "Un morceau de chance" (p4-c5) = A bit of luck.
- "Secouons-nous les mains" (p4-c7) = Let’s shake hands.
- "Je demande votre pardon" (p5-c3) = I beg your pardon.
- "Je ne voudrais pas être un ennui pour vous" (p6-c6) = I don’t want to be any trouble for you.
- "Un joyeux bon garçon" (p24-c5) = A jolly good fellow.
- "Nous devons." (p24-c2) = We have to.
- "Ma bonté!" (p25-c2) = My goodness!.
- "Gardez votre lèvre supérieure rigide" (p25-c4) = Keep a stiff upper lip = garder son sang-froid.
- "Il est devenu absolument noix" (p26-c4) = He is going nuts = devenir fou, perdre les pédales (= to lose the pedals, si on joue le jeu de Goscinny).
- "J’étais en dehors de mes esprits avec l’inquiétude" (p28-c2) = I was out of my mind with worry = "j’étais inquiet".
- "C’était grand de vous avoir ici" (p43-c7) = It was grand to have you.
Noms de personnages
Zebigbos (p3c1) = the big boss = le grand chef.
Traditions britanniques
- À cinq heures de l’après-midi (le five o’clock), les Bretons boivent de l’eau chaude (p2-c6) : il s’agit de la célèbre tradition du thé, lequel revient en planches 41, 43 et 44.
- La marmalade chère aux Britanniques est une sorte de faux-ami et ne correspond pas tout à fait à la marmelade française : il s’agit quasi exclusivement de confiture d’oranges amères. Les Bretons (p2-c6) la consomment sur des "rôties", traduction littérale du toast.
- Les incessants brouillard (p3-c8) et pluie (p10-c7).
- Cambridge et ses rameurs (p3-c10); cf. The Boat Race.
- L’heure hâtive de fermeture des pubs qui a longtemps prévalu (p11-c6).
- La cervoise (tiède) (p11-c6), ancêtre de la bière, indissociablement liée aux pubs, dont il est fait une bien plus grande consommation outre-Manche qu’en France. (voir ici).
- Au restaurant (pub), le décurion joue aux fléchettes (p12-c7).
- Les chars roulent à gauche (p13-c3).
- Le gazon anglais (p14-c1).
- Les mesures anglo-saxonnes non décimales (p16-c8) – très compliquées il faut bien le dire – font dire à Obélix "Ils sont fous ces Bretons".
- Le bus à impériale (p20-c6).
- Les parapluies (p20-c7), liés au mauvais temps légendaire en Grande-Bretagne.
- Le chapeau melon (p20-c8).
- La célèbre tour de Londres (p25-c8).
- Les quartiers résidentiels où toutes les maisons se ressemblent (p28-c9).
- Le flegme britannique (p30).
- Les Écossais radins (p31-c4 : les Calédoniens).
- Le rugby (p33).
- L’humour britannique (p33-c1).
Syntaxe
Goscinny joue sur les éléments de syntaxe qui diffèrent entre l’anglais et le français et les adapte tels quels dans le texte français :
- Le question-tag typique de la grammaire anglo-saxonne, à savoir la tournure interrogative qui peut terminer une phrase, ce qui correspond au "n’est-ce pas?" français.
- "Je pense qu’il va être l’heure, n’est-il pas?" (p2-c4), alors que le français jouerait d’un "n’est-ce pas?"; soit It’s going to be about time, isn’t it?
- L’adjectif apposé avant le substantif en anglais (a good friend) : Jolitorax, le cousin germain d’Astérix, parle de la "magique potion" (p5-c1), puis des "romaines armées" (p5-c2), etc. Cette blague est la plus utilisée de l’album, identifiant même les Bretons.
- Obélix remarque cette spécificité de langage et l’adapte immédiatement, à sa manière : "Je commençais à avoir un appétit gros" (p11-c1).
- Ceci dit – et c’est d’autant plus vrai que Goscinny précise bien que les Bretons parlent la même langue que les Gaulois (p2-c2). Jolitorax et d’autres Bretons oublient de temps en temps cette inversion, par exemple "un cousin germain" et "une potion magique" (p3-c4).
Autres éléments culturels
- "Mon tailleur est riche" (p5-c9), célèbre répartie des manuels Assimil (My tailor is rich).
- Il est souvent fait allusion au jugement continental quant aux qualités de la cuisine britannique. "En Bretagne, la nourriture est délicieuse" (p7-c3) ; ou à la célèbre sauce à la menthe (p15-c4).
- Le tunnel sous la Manche (p10-c8).
- Les Beatles (p15-c10).
Sources :
Wikipedia (fr) : http://fr.wikipedia.org/wiki/Ast%C3%A9rix_chez_les_Bretons