La princesse au bol enchanté (nobi nobi !)

Cette histoire est tirée de l’Otogizôshi, un recueil de contes japonais vieux de plus de deux siècles. Malgré son origine nippone, la trame évoque fortement celle de Cendrillon sous de nombreux aspects. C’est donc une histoire à la fois dure et porteuse d’espoir qui nous est relatée sous la plume de Samantha Bailly qui fait ici un très beau travail d’adaptation.

Les dessins qui accompagnent les textes sont assurés par Ein Lee, dont le talent d’illustratrice n’a cessé de se développer depuis les premiers livres qu’elle a réalisés pour Nobi Nobi.

Synopsis

Haruka est la fille d’un des nombreux seigneurs féodaux du japon médiéval, cette filiation fait d’elle une authentique princesse. Malgré une vie aisée, sa famille n’est pas à l’abri de la maladie et la pauvre Haruka perdra sa mère à l’âge de 13 ans.
Avant de mourir, la mère d’Haruka a mis un bol sur la tête de sa fille et a invoqué l’aide de la déesse Kannon pour qu’elle la protège en son absence.

Malheureusement l’aide de Kannon semble s’être transformée en malédiction car depuis cette invocation, Haruka ne peut plus retirer le bol de sa tête ce qui lui vaut les railleries de son entourage. Pour ne rien arranger, la nouvelle femme du père d’Haruka va parvenir à monter le père contre sa fille au point de réussir à la faire chasser du domicile familial.
Haruka se retrouve seule et sans le sou, errant avec son bol sur la tête sans aucune perspective d’avenir. Mais heureusement pour elle, Kannon ne l’a pas abandonnée.

Critique et analyse

On sent qu’il s’agit d’un conte ancien car par rapport à des histoires contemporaines, celle-ci apparaît comme très dure. En effet, dès la seconde page la mère meurt, puis Haruka se fait jeter à la rue par son propre père. D’une certaine manière, même si cela évoque Cendrillon, c’est bien plus tragique encore car dans ce conte européen, la mort des parents n’est pas montrée et Cendrillon n’est pas rejetée par son père biologique.

Avec une telle entrée en matière, les enfants sont immédiatement captivés, ils sont presque sous le choc. Comme la littérature de jeunesse a plutôt tendance à éviter d’aborder des sujets comme la mort ou l’abandon des enfants par leurs parents, il n’est guère étonnant que les enfants soient pris au dépourvu et vous pilonnent de questions dès les premières pages.
Qu’un parent puisse mourir avant qu’ils soient adultes est en soit difficile à accepter pour les plus jeunes, mais que le parent survivant abandonne son enfant délibérément leur semble inconcevable car, contrairement à l’histoire du Petit poucet, le père d’Haruka n’a pas de problème pour nourrir sa famille.

Les questionnements que provoque cette histoire chez les enfants et les discutions qu’il en résulte sont probablement le point fort du livre. Il est rafraîchissant d’avoir enfin un scénario qui interpelle les enfants sans chercher à tout prix à leur montrer un monde idyllique.

Heureusement Haruka finira par s’en sortir (grâce au prince charmant) et même à se réconcilier avec son père. Ce dernier point est important car cela rassure les enfants sur la fiabilité (relative) des parents et évite de perturber leur sommeil.
Ce conte ne traumatisera donc pas vos enfants, mais on sent que lorsque l’on referme le livre, les aléas du destin vécus par Hakura continuent de les travailler en toile de fond. Ne soyez donc pas surpris si des questionnements arrivent au petit-déjeuner et si le soir venu l’on vous demande de relire l’histoire encore une fois.

Synthèse

Voici un conte à la fois dur et passionnant qui, malgré son titre, captivera aussi bien les filles que les garçons. Le graphisme de Ein Lee fascine toujours autant et ne peut que séduire les amoureux du Japon qu’ils soient petits ou grands.