Mon voisin Masuda (nobi nobi !)
Miho n’a plus envie d’aller à l’école, elle préfèrerait encore être malade, mais elle est en pleine santé et sa mère l’envoie étudier. Par dépit, elle envisage alors d’aller jouer au square plutôt que d’aller à l’école. Mais qu’est-ce qui peut donc tant travailler cette petite fille de 7 ans ? Les profs sont-ils des tyrans ou peut-être que les cours ne sont pas intéressants ?
En réalité, c’est bien pire que cela, son voisin de table est le terrible Masuda, un petit monstre enragé qui ne fait que l’embêter à longueur de journées.
Avec son graphisme dépouillé, Miho Takeda sait rendre les émotions avec une économie de moyens très efficace. Le sentiment de solitude de la petite est parfois rendu avec une page blanche dans laquelle Miho semble perdue. Seules quelques lignes de texte viennent habiller la double page. Cette approche tranche beaucoup avec les livres pour enfants qui sont parfois saturés de couleurs et de détails.
Le graphisme enfantin à base d’aplats fonctionne parfaitement et contribue à la clarté de la narration en évitant de se perdre en éléments inutiles. On se focalise ici sur l’histoire qui, sous ses airs décalés avec le monstre vert, traite d’un sujet difficile qui traumatise beaucoup d’enfants et dont certains ont peur de parler.
Le monstre vert est en réalité un simple enfant comme les autres qui est un peu trop taquin. Ses brimades finissent par détériorer la joie de vivre de Miho. Cette problématique étant très courante, l’histoire peut aider un enfant soit en lui permettant de parler de quelque chose qui le touche déjà, soit en abordant le problème avec lui en amont, pour que, s’il est un jour victime de cela, il n’ait pas peur d’en parler à ses parents.
Mais la force de cette histoire est de ne pas être trop manichéenne. Pour un livre pour enfant c’est plutôt rare. En effet, si on lit entre les lignes, on peut voir que le monstre Masuda cherche surtout à attirer l’attention de Miho, pas à la rendre malheureuse. On remarque qu’il tend plusieurs perches à Miho pour aller vers elle et l’aider, mais celle-ci le rejette froidement ce qui finit par le pousser à être de plus en plus méchant. Il faudra un clash très fort avec lui pour que Miho commence à le voir différemment, cependant elle ne changera pas d’attitude pour autant et continue de le rejeter.
Cette fin est assez inattendue, si votre enfant a plus de 7 ans, il est possible de lui faire ressentir que, malgré les apparences, les torts ne sont pas uniquement du côté du vilain monstre Masuda. Nos réactions d’indifférence sont parfois aussi blessantes que les méchancetés que peut faire Masuda à Miho. Voici donc un livre d’enfants où pour une fois tout n’est pas en noir et blanc, mais plutôt en niveau gris dans univers tout en couleur.
Il permettra sûrement d’engager quelques discutions passionnantes avec votre enfant.