Les Légendaires Tome 10 : La marque du destin

Dans le tome précédent, les Légendaires ont découvert que Shimy allait servir de réceptacle pour la réincarnation du dieu maléfique Anathos. La solution la plus simple et la plus radiale aurait été d’éliminer Shimy, mais ils ne peuvent s’y résoudre. Finalement, les Légendaires décident de tenter d’affronter Anathos tant qu’il est encore dans la Porteuse, mais ils n’ont que 24 heures pour se préparer à ce combat décisif.

Critique

Patrick Sobral nous livre l’un des meilleurs épisodes de la série. Les rebondissements sont nombreux et bien amenés et même si le ton est particulièrement sombre, l’humour allège toujours l’ensemble. Humour qu’on retrouve aussi dans le traitement amoureux entre les personnages car même si leur idylle est très bien racontée, le fait de condenser les trois romances sur seulement trois pages frise presque la parodie des canons du genre (ce qui est probablement voulu).

Cependant, ne vous y trompez pas, le tout est traduit avec beaucoup de sensibilité et de finesse et les personnages n’en deviennent que plus attachant (surtout Ténébris).
Shimy est le personnage central de cette histoire. Elle est accablée par ses erreurs et ses angoisses ce qui laisse transparaître une fragilité qu’on ne lui connaissait pas et qui la rend un peu plus humaine (un comble pour une elfe…)

Graphiquement, les décors sont bien plus fouillés tout comme la mise en couleur qui a passé un cap. Chromatiquement, on reconnaît la pâte de l’auteur car l’ensemble évoque toujours fortement le monde du dessin-animé. Les fans ne seront donc pas dépaysés.

On sent que la série ne sera plus jamais comme avant pour les Légendaires, et cette rupture plaira sans doute au public qui devient plus âgé.
Chercher à changer le ton d’une série est quelque chose de très rare en France car c’est considéré comme risqué. Au Japon, c’est beaucoup plus fréquent car des sondages hebdomadaires permettent de connaître les attentes du public lors des prépublications. Les mangas peuvent donc évoluer au fur et à mesure que le public mûrit. Cependant, comme Patrick Sobral est un auteur qui passe la plupart de ses week-end en dédicace depuis plusieurs années, il a pu mesurer très concrètement l’évolution de son lectorat sans avoir recourt à des sondages.

Ce pari s’est avéré gagnant car à présent sa BD est à même de toucher les adolescents, mais aussi les jeunes adultes nés entre 1975 et 1990 car ils ne seront pas insensibles aux références qui inspirent l’auteur (références souvent issues des dessins animés de cette époque)

Au final, un excellent tome qui réussi une transition délicate mais prometteuse.

Anecdote

Notons aussi qu’avec la première édition de 2008, était livrée avec le magnifique poster ci-dessous (40 x 56 cm) représentant les Légendaires adultes. Ce poster était offert par Nickelodeon et pour la petite histoire sachez que le dessin original a été offert par l’auteur pour que sa vente profite à une association caritative.

Résumé

L’histoire commence sur un flash-back à l’époque ou Razzia était encore enfant. C’était un petit gros qui se laissait marcher sur les pieds par la bande des Golden Skulls. Alors qu’ils étaient en train de l’embêter, Sheyla la petite sœur de Razzia intervient et dérouille le chef de la bande pour lui reprendre le livre qu’il avait pris à Razzia. Sheyla est découragée par son frère, il ne sait pas se défendre par lui-même et pourtant il veut devenir comme son idole : Korbo l’archéologue aventurier (genre d’Indiana Jones). Sauf que, comme Sheyla lui fait justement remarquer, Korbo n’existe pas, c’est un personnage de fiction. Mais peu importe Razzia veut devenir comme lui.

Attention,  ce qui suit dévoile des moments clés de l’intrigue.

Refermons ce chapitre du passé de Razzia pour revenir dans le présent en pleine tempête sur un bateau appelé l’Unicorne commandé par le capitaine Olbatar. Les Légendaires voyagent sur ce navire pour tenter de fuir le dieu Anathos. Ils savent à présent que c’est Shimy qui doit lui servir de réceptacle pour sa réincarnation. Celle-ci aurait fait un pacte avec lui le jour de sa Karysal, c’est-à-dire le jour où elle recevait la bénédiction des esprits dans le temple de Karys. Malheureusement, les esprits élémentaires avaient été chassés par l’esprit d’Anathos et lorsqu’elle est entrée, il en a profité pour marquer son front de son symbole.

Le sursis

Danaël en veut à Shimy de s’être laissé séduire par le pouvoir d’Anathos. Pourtant, il ne compte pas l’abandonner pour autant. La Porteuse apparaît subitement dans le ciel (la Porteuse est la prison organique qui contient l’âme d’Anathos). Anathos commence le processus de réincarnation sans que personne ne puisse l’en empêcher. Danaël propose alors un marché à Anathos. Si le dieu maléfique leur laisse 24 heures de délais, en retour, les Légendaires lui offriront le plus beau des combats qu’il puisse imaginer contre le héros d’Alysia. Anathos est amusé par l’arrogance des humains et il leur accorde une journée de répit pour se préparer.

Le capitaine Olbatar dépose les Légendaires sur l’île d’Erghyr qui a l’avantage d’être inhabitée ce qui permet au Légendaires de combattre sans risquer de faire des victimes collatérales. Shimy est affaiblie par la tentative avortée de réincarnation. Ses cheveux sont même devenus blancs.
Pendant ce temps, dans le palais du Gardien (un genre de vaisseau spatial en orbite), Elysio et Darkhell récupèrent des blessures que leur a infligées les bombes de Toopie (voir tome 9).

Le Gardien commence à se résigner car il faut encore deux jours pour que Elysio et Darkhell soient sur pieds. Autrement dit, Anathos aura le temps de se réincarner. Et malheureusement, une fois sa réincarnation achevée, aucun des deux ne pourra lutter face à son pouvoir.

Le passé de Razzia

On a de nouveau droit à un petit flash-back sur l’enfance de Razzia. On le voit sortir des décombres de son école, la ville est en feu et il n’y a plus âme qui vive. Razzia ne tarde pas à comprendre qu’il est le seul survivant et que sa famille a été tuée elle aussi. Les responsables de ce massacre ont laissé leur signature : un drapeau à tête de loup symbole de l’Armée des 1000 Loups. Razzia se laisse alors envahir par la colère et par un sentiment de vengeance qui ne s’apaisera qu’au bout de vingt années (voir le début du tome 11).

La nuit est tombée sur l’île déserte. Razzia s’est isolé du groupe pour méditer sur son passé. Mais Ténébris ne tarde pas à le rejoindre. Elle tente de discuter mais Razzia lui demande de façon désagréable de le laisser seul. Ténébris se sent blessée par son attitude, les autres Légendaires ont fini par tolérer sa présence malgré son passé peu reluisant, et le seul qui a un passé aussi sombre que le sien ne fait aucun effort pour l’accepter un minimum.
Elle lui demande pourquoi il serait le seul à avoir une seconde chance. Razzia réalise alors qu’il a été injuste avec elle. Il lui explique que ce n’est pas elle qu’il rejette. Sa présence lui rappelle simplement sa part d’ombre et il a peur de ne plus réussir à la surmonter. Ténébris prend alors le visage de Razzia dans ces mains et lui dit qu’il faudra bien qu’il s’y fasse, car elle a besoin de lui, car à ses yeux, Razzia est sa part de lumière. Sur ces belles paroles, elle l’embrasse et cette fois Razzia la laisse faire (elle avait déjà tenté sans succès au tome 9).

Déclarations amoureuses

Pendant ce temps au coin du feu Gryf refuse de promettre à Shimy de s’enfuir si elle devient Anathos car il ne pourra pas vivre sans elle. Un tel épanchement sentimental est rare chez Gryf, Shimy est touchée de voir que Gryf met son cœur à nu et ils finissent par s’embrasser.
De son côté Danaël fait une demande en mariage officielle à Jadina que celle-ci s’empresse d’accepter.

Les Faucons d’Argent

A plusieurs kilomètres de là, les Faucons d’Argent ont appris que les Légendaires ont embarqué sur l’Unicorne au port de Ceyar. Ils cherchent activement quelles sont les îles où ils peuvent être. C’est alors qu’arrive la délégation elfique envoyée par le roi Kash-Kash. Ikael le leader des Faucons d’Argent est d’abord très heureux de recevoir des renforts, mais il déchante vite en constatant que c’est Shamira (la mère de Shimy) qui dirige le détachement elfique. Celle-ci est particulièrement remontée et veut comprendre comment les Légendaires et surtout sa fille ont pu passer du statut de héros à celui de paria.

L’affrontement final

Pendant qu’Ikaël tente de s’expliquer avec Shamira, les Légendaires ont déjà commencé à affronter la Porteuse qui est contrôlée par Anathos. La stratégie est simple Gryf et Danaël affrontent Anathos pendant que le reste de l’équipe a pour mission d’éloigner Shimy loin de lui et de la protéger.

Mais Jadina ne tarde pas à réaliser que Danaël lui a menti. Si le combat devait mal tourner, Razzia et Ténébris ont reçu l’ordre de tuer Shimy et non de la protéger. Danaël savait que Gryf s’y opposerait c’est pour ça qu’il combat Anathos avec lui. Quant à Jadina, son cœur est trop pur et sensible, elle aurait refusé de participer à ce plan si elle en avait connue la finalité. D’ailleurs, elle ne peut se résoudre à laisser Shimy se faire tuer par ses propres camarades. Mais Shimy est résignée. Grâce a ses grandes facultés auditives, elle avait réussi à entendre ce que Danaël avait ordonné à Razzia et Ténébris. Elle s’est laissée conduire jusqu’ici pour se faire tuer, car elle pense elle aussi que c’est la meilleure solution à adopter si Danaël et Gryf n’arrivaient pas à tuer Anathos.

Pourtant quelque chose cloche. Il est clair que si Anathos les a retrouvés facilement c’est parce qu’il peut connaître leurs moindres faits et gestes. Donc s’il connaissait le plan de Danaël, pourquoi les avoir laissés partir ? Ils comprennent rapidement que c’est parce qu’Anathos a une solution de secours. Le groupe fait alors demi tour pour tenter de prévenir Danaël et Gryf, mais ils arrivent trop tard. Danaël vient de terrasser la Porteuse en la décapitant. Anathos n’a plus d’autre choix que de se réincarner dans l’autre personne qui porte son symbole : Danaël.

La réincarnation d’Anathos

En effet Danaël portait un médaillon que lui avait offert Shimy. Ce médaillon est une clé qui permet d’aller et venir dans le monde des elfes.Mais, il porte lui aussi la marque d’Anathos. Du coup Danaël devient lui aussi un réceptacle potentiel pour l’âme d’Anathos. Jadina tente d’intervenir pour sauver Danaël, mais la transformation a déjà commencé et tout ce qu’elle obtient, c’est un coup d’épée qui lui traverse le ventre. Les autres tentent alors d’intervenir, mais sans succès. Gryf se fait lacérer le torse, Razzia se fait couper le bras droit et Shimy reçoit deux coups d’épée sur les yeux et perd la vue.

Après cet assaut, seule Ténébris est encore debout. Anathos lui propose alors de rentrer à son service pour diriger son armée et éliminer l’espèce humaine (qu’il considère comme des parasites). Bien que Ténébris ne soit pas en position de refuser, elle décline l’offre car elle est amoureuse de l’un de ces « parasites humain».

Amour paternel

Elle se lance dans un dernier assaut inutile que suicidaire, mais son attaque est interrompue par l’arrivée de ses deux pères Elysio et Darkhell (pour rappel ils ne formaient autrefois qu’une seule et même personne). Tous deux ordonnent à Ténébris d’évacuer les blessés par le portail dimensionnel. Elysio et Darkhell ont parfaitement conscience que leur pouvoir est insuffisant pour faire face à Anathos, ils ont donc trouvé la parade : fusionner pour ne refaire plus qu’un.
Un fois la fusion achevée, le pouvoir de Darkhell/Elysio est tel que même les effets de la Pierre de Jovenia sont inopérants. Le sorcier qui fait à présent face à Anathos est un adulte.
Dès que Ténébris est partie avec ce qui reste des Légendaires, le portail se referme laissant le sorcier Elysio/Darkhell seul face à Anathos.

Anathos ne s’attendait pas à un tel pouvoir. Le combat s’éternise car leur force magique s’équivaut. Pour réussir à vaincre son adversaire, Anathos doit utiliser une ruse et le prendre en traître. Elysio/Darkhell succombe à l’attaque mettant fin à la fusion.
Anathos en ayant terminé avec les « soldats » du Gardien, il s’en prend au Gardien lui-même, détruisant son château et lui avec.

Anathos se doute que les Légendaires reviendront sûrement lui faire des problèmes, il décide donc de créer à partir de leur sang des clones maléfiques appelés les Infernaux. Puis il crée une sorte de château mobile appelé Castlewar qui ressemble vaguement à un crabe géant. Ce monstre est grand comme une île et parcourt Alysia en détruisant méthodiquement toutes les villes qu’il rencontre.

De son côté Ténébris vient d’arriver dans le campement des Faucons d’Argent en implorant de l’aide. Razzia, Jadina, Shimy et Gryf gisent inconscient sur le sol, baignant dans leur propre sang.

Humour décrypté

Pour être sûr de ne pas faire d’erreur, nous avons soumis notre analyse à Patrick Sobral  en relevant chaque mot qu’il a créé pour sa BD (même si nous n’avions pas trouvé d’explication).
Patrick Sobral a donc corrigé, complété ou confirmé chaque point. Par conséquent, si certains mots ne sont pas cités ci-dessous, c’est simplement qu’ils n’ont pas d’origine particulière.

Page 05 : le Capitaine de l’Unicorne s’appelle Olbatar -> c’est un anagramme du capitaine Albator (1978 et 1984) qui forme la phrase : « Oh, le bâtard ! ». On notera que le capitaine Albator et Olbatar ont tous les deux une cicatrice au visage et un œil en moins.

Page 14 : L’île d’Erghyr -> Clin d’œil au manga Air Gear d’?gure Ito.

Page 21 : Le port de Ceyar -> allusion au personnage Seiyar le chevalier de Pégase dans la série Saint Seiya (Les Chevaliers du Zodiaque – 1988)