Critique de Kick-Ass : Un style qui se cherche
Tiré d’un comics de John Romita Jr. et Mark Millar, Kick Ass raconte comment un adolescent un peu cinglé décide de devenir un super héro masqué volant au secours de la veuve et de l’orphelin. Le seul problème, c’est qu’il a beau avoir le costume, il lui manque les super pouvoirs. La bande annonce avait un avant goût très prometteur, humour, action, parodie décalée des films de super héros, l’attente était énorme, un peu trop peut-être…
Le film démarre très bien, le processus de réflexion qui va conduire un looser à devenir un « super héro » est parfaitement décrit, il sonne juste de bout en bout. C’est froid, réaliste et hilarant. La rupture de ton est maniée avec beaucoup de finesse. Malgré l’approche comique, ce film est une critique pleine de bon sens sur la société moderne. Je pense en particulier à cette scène où des voyous traitent Kick Ass de cinglé parce qu’il a pris la défense d’un inconnu. Kick Ass jette alors un regard sur les passants qui filment au lieu d’intervenir et demande aux voyous si c’est réellement lui le plus cinglé.
Ce film met le doigt où ça fait mal. Dans notre société actuelle, protéger un inconnu, c’est risquer d’avoir des ennuis. Soit en se prenant un coup de couteau, soit en ayant ensuite des problèmes avec la police pour avoir osé faire du mal à l’agresseur. Lorsqu’on voit qu’en France, la famille d’une gamine qui a été violée a été contrainte de déménager parce qu’ils étaient harcelés par les copains du violeur (voir news), on se dit que ce film est moins superficiel qu’il en a l’air.
Les débuts du héros promettent un film qui va révolutionner le genre, à la frontière entre Batman (pour le côté dénué de super pouvoir) et Spiderman (pour le côté looser paumé). Malheureusement, alors qu’il semblait prendre le contre-pied total des films de super héros, le scénario sombre doucement dans les canons les plus éculés du genre sans y apporter la moindre nouveauté ni décalage réel.
D’un style sombre et réaliste saupoudré d’un humour dévastateur, on glisse vers un plat réchauffé ressemblant à un mélange de Punisher et Batman Begin. Kick Ass devient un personnage de second plan et se fait voler la vedette par Big Daddy (Nicolas Cage) et Hit Girl son « Robin » féminin. Le film vire vers une improbable histoire de vengeance où l’action filmée à la Matrix contraste un peu trop avec les bagarres foireuses du début. Ce manque de cohérence donne l’impression que le réalisateur Matthew Vaughn aurait traîtreusement donné la moitié de son boulot à faire par quelqu’un d’autre.
C’est un peu dommage car le personnage de Kick Ass était assez novateur pour tenir le film à lui tout seul sans avoir besoin de revenir s’enliser dans les codes classiques des super héros dont il prenait le contre-pied avec brio au début du film.
Quoi qu’il en soit ce film reste un excellent divertissement pour les fans de super héros qui y verront un hommage réussi. Quant aux autres, ils trouveront peut-être le film un peu long, surtout si ils ont vu la bande annonce car elle ne reflètent pas la teneur réelle du produit. Non pas que le film soit mauvais, il est juste loin de l’image qu’on nous a vendue.